- DILEMME
- DILEMMEDILEMMEOriginellement, le dilemme désigne un argument à deux prémisses. Sa signification s’est restreinte, chez les rhéteurs hellénistiques du IIe siècle, aux arguments dont les stances du Cid représentent pour nous le meilleur exemple:– Si je tue don Gormas [le père de Chimène], je perds Chimène.– Si je ne tue pas don Gormas [et ainsi me déshonore], je perds Chimène.– Ou bien je tue don Gormas, ou bien je ne le tue pas.– De toute façon, je perds Chimène.Ce dilemme peut s’exprimer, en logique propositionnelle, par la loi logique suivante: face=F0019索[(p face=F0019念 q ) face=F0019練 (r face=F0019念 q )] face=F0019練 (p V r ) face=F0019參 face=F0019念 q.En général, dans la littérature, le dilemme est l’expression d’une situation tragique, de l’inéluctable; la liberté humaine ne dispose que d’un choix dérisoire (si p et r représentent des actions possibles) sans influence sur l’issue fatale de l’événement (q ); d’où l’expression «cruel dilemme».• 1555; bas lat. dilemma, gr. dilêmma;→ lemme1 ♦ Philos. Raisonnement dont la majeure contient une alternative à deux ou plusieurs termes différents ou contradictoires, menant à une même conclusion; syllogisme disjonctif.2 ♦ (1948) Alternative contenant deux propositions contraires ou contradictoires et entre lesquelles on est mis en demeure de choisir. ⇒ 1. alternative. Cruel, difficile, terrible dilemme. Être devant un dilemme. Comment sortir de ce dilemme ? Enfermer qqn dans un dilemme. « La culpabilité de Dreyfus, ou bien l'infamie de l'état-major : voilà dans quel dilemme imbécile on a enfermé ces officiers » (Martin du Gard).Synonymes :dilemmen. m.d1./d Cour. Situation qui donne à choisir impérativement entre deux partis, chacun entraînant des conséquences graves. Se trouver confronté à un dilemme (souvent pris abusiv. pour alternative).d2./d PHILO Raisonnement présentant en majeure (II, sens 3) une alternative dont les différents termes conduisent à la même conclusion.⇒DILEMME, subst. masc.A.— LOG. Raisonnement dans lequel deux prémisses contraires, dont l'une est fausse si l'autre est juste, conduisent toutes deux à une même solution. Construire, poser, refuser un dilemme; s'enfermer dans un dilemme. Je sens bien que mon dilemme ne vous convaincra pas et qu'un dilemme n'empêche pas le cœur de saigner (CHATEAUBR., Corresp., t. 2, 1789-1824, p. 3). Cependant, la solution du problème qui m'est soumis peut affecter la forme du dilemme (VERNE, Vingt mille lieues, t. 1, 1870, p. 17).B.— P. ext. usuel. Nécessité dans laquelle se trouve une personne de devoir choisir entre les deux termes contradictoires et également insatisfaisants d'une alternative. Abominable, angoissant, cruel dilemme (à résoudre). Je m'agite dans ce dilemme : être moral; être sincère (GIDE, Journal, 1892, p. 29). Pour elle, en ces heures-là, aucun autre dilemme qu'être ou ne pas être (MAURIAC, Cah. noir, 1943, p. 370).Rem. On rencontre ds la docum. a) La forme dilemme chez différents aut. On a fait ce dilemme : violation de la propriété, ou prime à la délation (PROUDHON, Révol. soc., 1852, p. 297). b) Dilemnatique, adj., rare. Qui ressortit au dilemme. À quarante ans, la femme (...) éprouve un effroi solennel (...) Voici le sens dilemnatique de cette crise (BALZAC, Pts bourg., 1850, p. 67).Prononc. et Orth. :[
]. Enq. :/dilem/. Ds Ac. 1694-1932. Var. dilemne par dissimilation des 2 m dans des aut. comme SAND, Compagn. Tour de Fr., 1840, p. 76; PROUDHON, Les Confessions d'un révolutionnaire, 1849, p. 331; BALZAC, Œuvres div., t. 2, 1830-35, p. 128; HUGO, Pitié supr., 1879, p. 167; J. VUILLEMIN, Être et travail, 1949, p. 1; HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 104, 322, 393. Noter que ces aut. ont écrit mm ailleurs (cf. BALZAC, Lettres Étr., t. 3, 1850, p. 35; HUGO, op. cit., p. 167; J. VUILLEMIN, op. cit., p. 78, 211). Étymol. et Hist. 1555 le dilemme de Menon (LA RAMÉE, Dial., II, 3 ds GDF. Compl.); 1662 dilemme (B. PASCAL, Pensées, p. 549). Empr. au b. lat. dilemma, terme de log., gr.
. Fréq. abs. littér. :199. Bbg. HONORÉ (M.). Qu'est-ce qu'un dilemme? Vie Lang. 1957, pp. 253-254. — SPENCE (N.C.W.). Fr. St. 1972, t. 26, p. 495.
dilemme [dilɛm] n. m.ÉTYM. 1555, in T. L. F.; bas lat. dilemma, grec dilêmma, de dis-, et lêmma « prémisse d'un syllogisme ». → Lemme.❖1 Philos. Raisonnement dont la majeure contient une alternative à deux ou plusieurs termes (différents ou contradictoires) et dont les mineures montrent que chaque cas de l'alternative implique la même conclusion. ⇒ Disjonctif (syllogisme disjonctif). || Les termes d'un dilemme. || Poser un dilemme. || Argument posé sous forme de dilemme.1 Soit le dilemme d'Omar, cousin de Mahomet, à propos de l'incendie de la bibliothèque d'Alexandrie : Ou ces livres sont conformes au Coran, ou ils lui sont contraires. S'ils lui sont conformes, ils sont inutiles et encombrants. S'ils lui sont contraires, ils sont dangereux. Donc, dans les deux cas, il faut les brûler.A. Bottequin, Subtilités et délicatesses de langage, p. 111.2 (1948). Alternative contenant deux propositions contraires ou contradictoires et entre lesquelles on est mis en demeure de choisir. || Être devant un dilemme difficile à résoudre. || Enfermer quelqu'un dans un dilemme. || Comment sortir de ce dilemme ?2 (…) la culpabilité de Dreyfus, ou bien l'infamie de l'état-major : voilà dans quel dilemme imbécile on a enfermé ces officiers.Martin du Gard, Jean Barois, p. 316.3 Il semble aujourd'hui que nous soyons enfermés dans un dilemme. Le gigantesque accroissement de perfection technique, de richesses matérielles, de moyens d'exploiter la terre, paraît devoir être fatalement équilibré par une diminution de la valeur de la personne. Ce dilemme est inacceptable.Daniel-Rops, Ce qui meurt…, I, p. 17.❖DÉR. Dilemmatique.
Encyclopédie Universelle. 2012.